Politique de la ville la nuit : Toulouse sur la bonne voie ?

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Il y a des tentatives pour penser la ville la nuit autrement. La question est posée depuis quelques années en Europe. Un maire de la Nuit officie depuis 2003 à Amsterdam et un Grand Conseil de la Nuit a été créé, mi-2011, à Genève. A Paris, un conseiller délégué en charge de la Nuit a rejoint la nouvelle équipe municipale d’Hidalgo.

 

En mai 2008, Christine Boutin, alors ministre du Logement et de la Ville, avait confié une mission d’étude sur la pratique de la ville la nuit au chercheur et géographe de la nuit Luc Gwiazdzinski, menée en collaboration avec Xavier Emmanuelli, Président du Samu social, la Délégation interministérielle à la ville, des agents des services publics, l’INSEE…  Celle-ci portait tant sur les aspects économiques, sociaux, sanitaires, urbains la nuit qui « sont encore insuffisamment connus et pris en compte dans les stratégies des politiques publiques », déclarait la ministre. Les auteurs avaient recommandé la création d’un poste de maire de nuit, d’une offre de mobilité nocturne, d’un service public minimal de nuit, de transports gratuits, d’établir une signalétique nocturne, d’ouvrir des havres de nuit dans les banlieues… Cinq ans plus tard, Toulouse et Paris ont leur maire de la Nuit.

 

La nuit : un potentiel de créations d’emplois

En 2011, Sandrine Mazetier, députée PS a fait une proposition de loi intitulée « Urbanité réussie, de jour comme de nuit » qui a, été rejetée. « La France a une perception négative et punitive de la nuit », déclarait la députée. Et d’ajouter : « Pourtant, de nombreuses métropoles (Barcelone, Londres, Berlin, Amsterdam) ont intégré la nuit dans les stratégies de développement urbain et économique. L’activité nocturne est, en effet, un potentiel de créations d’emplois et de richesses insuffisamment utilisé, à condition qu’elle se fasse dans le respect des riverains. »

Depuis mon élection en novembre dernier, j’ai organisé des États Généraux de la nuit à Toulouse, rédigé un Livre Blanc de la nuit, créé l’événement « Les Nocturnes 2014 » récompensant les professionnels de la nuit sur tous les segments : transports, sécurité, culture… ainsi que le laboratoire d’idées Toulouse Nocturne. Aujourd’hui, Toulouse est avant-gardiste et productrice de contenus sur la nuit. Mais il nous faut aller plus loin, ensemble, avec les collectivités pour répondre aux besoins des usagers et des travailleurs nocturnes.

 

La fabrique urbaine doit prendre en compte la composante nocturne

Jean-Luc Moudenc est aux affaires de la ville et président de l’Association des Maires de Grandes Villes de France. Il s’est engagé, entre autres, à étaler les horaires du métro jusqu’à 3 heures le week-end. C’est un début. Pour ma part, je me suis engagé à réaliser une étude sur le poids économique de la ville la nuit et sur le nombre de travailleurs nocturnes et à éditer un Guide des bons usages de la nuit en octobre, appuyé par un Comité scientifique. Toulouse est en quête de rayonnement, la nuit est une opportunité. L’Express titrait récemment sur « Les meilleurs maires des grandes villes » : « Lyon se démarque avec sa Fête des lumières, ses Nuits sonores ou encore son festival du film Lumière. » La composante nocturne est aujourd’hui à prendre en compte par les pouvoirs publics dans leur stratégie de développement de la « Fabrique urbaine » notamment dans le projet d’aménagement de la gare Matabiau Euro-Sud-Ouest. La nuit constitue un terreau fertile d’innovations. A saisir…

 

Christophe Vidal, président de Toulouse Nocturne, maire de la Nuit de Toulouse, éditeur du magazine Minuit