Exclu. Pierre Cohen : la campagne « rappelait 2002 »

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Un peu plus d’un mois après avoir perdu la mairie de Toulouse contre son adversaire de toujours, Pierre Cohen, désormais chef de l’opposition, revient sur son mandat, sur les raisons de sa défaite et ses relations avec Jean-Luc Moudenc. Dans une seconde interview, qui sera publiée demain, ce dernier répond à toutes les questions concernant son avenir à la tête de l’opposition. Entretien.

 

Toulouse Infos : Revenons en 2008, vous êtes maire de Ramonville, Jean-Luc Moudenc est maire de Toulouse, pourquoi vous lancer dans une bataille (mairie de Toulouse) qui semblait perdue d’avance ?

Pierre Cohen : J’y croyais pour plusieurs raisons. Tout d’abord, j’étais convaincu que mon parcours et mon profil me mettaient en capacité de redynamiser le PS, rassembler les partenaires de gauche mais aussi l’électorat. En plus, je connaissais bien Jean-Luc Moudenc et je savais qu’il n’était pas indétrônable. Ensuite, nous avions une équipe renouvelée et un beau projet qui était en capacité à répondre aux défis du moment. Il fallait une ambition à cette ville et nous avons su ouvrir Toulouse sur l’avenir. Enfin, je venais du monde de l’université, de l’innovation et des technologies, un profil qui correspondait à celui des néo-toulousains des dernières décennies.

T.I : On a beaucoup dit que vous aviez tâtonné au départ. Il a fallu attendre quasiment trois ans pour que les Toulousains voient les premiers travaux… Pourquoi autant de temps ?

P.C : D’abord nous n’avons pas attendu trois ans pour agir comme a pu le dire le chef de l’opposition. J’ai respecté ce que j’avais dit lors de la campagne de 2008, c’est-à-dire un projet en 1-3-6-12. En un an, nous avons mis à plat tous les sujets, réalisé la révision du PDU (plan de déplacement urbain) que l’équipe précédente n’avait pas réussi à faire et mis en place la Communauté urbaine. Au bout de trois ans, tout était mis en place pour pouvoir travailler sur le Toulouse des 10 ou 20 prochaines années et au bout du mandat, les premières réalisations ont pu être constatées par les Toulousains. Je ne pourrai malheureusement pas terminer ce projet.

T.I : Revenons sur la campagne, qu’est-ce qui n’a pas marché ? Comment expliquez-vous ce résultat ?

P.C : Il y a eu une déflagration nationale, on ne peut pas le nier. On me parle toujours de Martine Aubry qui a conservé Lille, mais elle est passée de plus de 65% des suffrages à 52%. À Toulouse, je n’avais pas autant de marge car l’écart était de 1200 voix en 2008. Mais il ne faut pas se cacher, localement des choses n’ont pas marché. Nous avons fait une campagne sur notre projet, nos ambitions et nos valeurs et il faut bien avouer que dans une période de désespérance, les promesses irréalistes de Moudenc sont entrées en percussion.

T.I : Dès septembre dernier, le Parti socialiste a débuté votre campagne, vous avez annoncé un nombre impressionnant de portes frappées, avez-vous senti que ça allait être difficile malgré des sondages qui vous donnaient toujours gagnant ?

P.C : Le contexte national a mobilisé la droite et démobilisé notre camp. Pendant le porte-à-porte, il n’y avait pas d’enthousiasme, mais rien n’allait pas. On sentait clairement que la situation était dangereuse. Ça rappelait 2002 (défaite de Jospin à la présidentielle) où la campagne s’est bien passée, où tout s’est bien passé mais où les gens qui souffrent, considèrent que vous n’êtes pas au rendez-vous de leurs attentes (emploi).

T.I : Concernant des projets comme le BHNS de Lardenne par exemple, votre gestion des conflits n’a-t-elle pas été une erreur à quelques mois des élections ?

P.C : J’ai toujours privilégié l’intérêt général aux égoïsmes et aux individualismes. Ce BHNS avait une vision globale qui dépassait les intérêts particuliers. Sa déviation vers Basso Cambo proposée par mon adversaire n’a pas de sens. J’ai fait une campagne sur un projet global alors que Moudenc a rassemblé les anti-tram, les anti-BHNS, les riverains opposés à l’aire de grand passage pour les gens du voyage à Gabardie-Montredon…il a fait un rassemblement de mécontents.

T.I : Depuis toujours, le courant ne passe pas entre vous et Jean-Luc Moudenc, d’où vient cette animosité ?

P.C : Beaucoup de choses nous opposent. Nous n’avons ni la même vision, ni la même pratique de la politique, ni le même tempérament. Personnellement, je ne le connais pas mais on se croise depuis longtemps puisqu’il a été mon Conseiller général lorsque j’étais maire de Ramonville, et je n’aime pas sa vision de la politique. De mon côté, mon parcours est cohérent. J’ai longtemps été militant, puis je suis devenu député par conviction et c’est parce que j’avais une vision de ce que devait devenir Toulouse que je me suis présenté en 2008. De son côté, tout n’est qu’opportunisme. Il est devenu député parce qu’il a été obligé, il est président de l’UMP31 alors que la politique le dégoute…moi mon parcours a toujours été cohérent.

Propos recueillis par Guillaume Truilhé

Pour lire la seconde partie, cliquez sur le lien : Pierre Cohen : « Je ne suis pas du style à plier la tête et à me cacher »