Racisme anti-blanc : Houria Bouteldja relaxée par la Cour d’Appel de Toulouse

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Hier, le tribunal a rendu public son délibéré dans l’affaire Houria Bouteldja, jugée le 15 octobre dernier par la Cour d’Appel de Toulouse. La porte-parole du Parti des Indigènes de la République (PIR) était poursuivie par l’Agrif pour « injures raciales contre les français ». L’association lui reprochait d’avoir utilisé le néologisme « souchiens » lors d’une émission télévisée pour désigner les français dits de souche. Sauf recours éventuel en cassation, la voici définitivement innocentée. Mais la militante politique aux convictions très tranchées ne baisse pas la garde pour autant.

 

Houria Bouteldja et son avocat maître Henri Braun peuvent avoir le sourire. La Cour d’Appel n’a retenu ni l’injure raciale ni le « racisme anti-blanc ». Un sujet polémique récemment remis à l’ordre du jour, mais aussi un chef d’accusation inédit dans l’histoire juridique française. Loin d’être gagné d’avance, ce verdict a même surpris l’intéressée. « Lors du procès, le parquet s’était joint au dépôt de plainte de l’Agrif. Très honnêtement, je pensais être condamnée » confie la jeune femme. Pas question pour autant d’infléchir ses positions. « Je ne reconnais pas le jeu de mot sous-chiens que certains ont bien voulu entendre. L’homophonie existe, je n’y peux rien. A la limite, il faudrait faire un procès à la langue française » ironise t-elle. « Dans les précédentes audiences, j’avais même fait venir un linguiste reconnu. Il avait démontré que le suffixe « -ien » était grammaticalement le plus approprié au mot « souche ». La construction de ce néologisme est parfaitement conforme à la langue française ». Mais lorsqu’on se penche sur le dossier, cette relaxe n’était pas si improbable. Au plan strictement juridique, difficile effectivement de prouver l’intention de blesser ou de nuire. Egalement, de désigner une « victime », puisque « français de souche » reste une notion obscure sur laquelle les voix ne s’accordent pas. Qu’elle soit fondée ou pas, dans les stricts faits, l’accusation ne reposait que sur une présomption. Et comme dirait Chirac, « ça a fait pschiiit ».

 

« Ce genre de procès va se multiplier »

Relaxée, mais pas relax pour autant. Même si, pour Houria Bouteldja, l’affaire est désormais close. « Je ne poursuivrai pas l’Agrif pour diffamation ou pour autre chose. C’est tellement ridicule, j’ai d’autres chats à fouetter. Le fait qu’une organisation raciste intente un procès contre moi ne me déshonore pas ». Ce qui n’empêche pas la jeune femme de voir dans cette affaire une certaine dérive sociétale. « Je pense que ce genre de procès va se multiplier, compte-tenu de l’ambiance politique générale. Le fait que la thèse du racisme anti-blanc soit par exemple validée par Copé, qui est un leader majeur de la vie politique française, me le montre aussi » table-t-elle. « Quand c’est Le Pen, ce n’est à la limite pas très grave. Seulement, quand la droite et une association anti-raciste comme le MRAP s’accordent sur ce discours, cela devient inquiétant. Etouffer la parole des militants indépendants semble être une nécessité politique ». De l’analyse à l’action, la porte-parole ne fait qu’un pas. Cette boxeuse judiciaire ne reste jamais très longtemps dans les cordes. Le sociologue Said Bouamama et le rappeur Saidou, auteurs d’un livre subtilement intitulé « Nique la France », sont eux aussi poursuivis par l’Agrif pour des motifs identiques. Houria Bouteldja leur a naturellement prêté son épaule. « Ils s’inscrivent dans la tradition française de critique des gouvernements, dans la filiation directe de personnes comme Aragon. Une pétition va bientôt sortir dans la presse. Nous les soutenons » affirme-t-elle avant de déclamer. « Nous avons gagné une bataille, mais pas la guerre. Le combat continue ».

 

Christophe Guerra