Municipales 2014 : le psychodrame Tisséo et ses conséquences actuelles

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En cette période estivale, il peut être utile de revenir sur cet épisode qui a fait couler beaucoup d’encre, et y apporter un éclairage d’ensemble en prenant du recul.

 

Affaire Tisséo, késaco ? La grande majorité de la population de l’agglomération toulousaine ignore tout de cette tempête dans un verre d’eau. Pour faire simple, Pierre Cohen a offert aux Verts comme cadeau de Noël en 2009 l’éviction d’un des leurs (Stéphane Coppey) de la présidence de Tisséo. La raison était une forte inimité entre les deux hommes, tout simplement.

Le quidam pourrait se demander comment un Vert s’est retrouvé président du puissant Tisséo ? Grâce à un accord entre les Verts et le PS à l’occasion des municipales de 2008. Notons ici l’erreur stratégique des Verts de négocier une présidence minoritaire (un président vert, mais soumis à une majorité socialiste), donc un siège éjectable. Une alternative aurait été de négocier une mairie d’une ville de taille moyenne, Ramonville par exemple dont le maire partait à Toulouse (les communistes avaient négocié ainsi précédemment St Orens). Ce ne sont pas les capacités d’action et d’initiative des deux possibilités de négociation qui ont déterminé le choix, mais quelle personnalité serait maire de Ramonville ou président de Tisséo. Donc une logique de courants internes, de rivalités, de calculs stratégiques. En politique, la question personnelle est bien souvent déterminante, chez les Verts comme ailleurs.

Les naïfs suivront la version officielle que cette éviction est à l’origine de la dynamique actuelle de liste verte autonome. Les Verts reviennent sans cesse sur cet événement qui les a traumatisés mais qui est plutôt passé inaperçu auprès des Toulousains. Comme je l’avais déjà indiqué précédemment, le choix est fait depuis longtemps chez EELV de faire une liste autonome à Toulouse, au moins depuis le résultat des élections Européennes de 2009. Soit six mois avant « l’affaire Tisséo ». Il s’agit donc d’un prétexte pratique à fortiori, mais pas d’un élément explicatif solide. En effet, le jeu d’équilibriste des Verts sur la question du vote du PDU apporte un éclairage intéressant. Lorsqu’il était président de Tisséo, Stéphane Coppey avait pour but principal de réaliser un PDU « socialo-compatible », c’est-à-dire pouvant être soutenu par la majorité socialiste. Les différences avec les PDU proposés par Pierre Cohen sont minimes. Les positions des Verts sont donc clairement des postures politiciennes : en fonction de qui présente un texte quasi-identique, leur vote sera différent. Pour trois projets très proches, les élus verts ont voté de trois façons différentes (pour, contre, abstention).

Il est également réducteur de tout ramener à la question de la personne du président. Peu importe pour les Toulousains qu’il soit Vert, Rose, Bleu, Multicoloré ou autre. Ce qui compte c’est la politique de transport mise en place. Notons que le leitmotiv de la Gauche locale était l’inaction et le manque d’investissement de la Droite pendant 40 ans. Il est toutefois problématique de voir la majorité actuelle abandonner des projets ambitieux et promis en 2008, notamment des lignes de tramway vers la périphérie. Au contraire, elle se satisfait d’une extension microscopique de la ligne E, qui aura engendré une gêne inversement proportionnelle à son utilité, et lancé à la place un grotesque projet de bus péri-urbain… en centre ville ! Au final une politique de bouts de ficelles, qui a d’ailleurs reçu un avis négatif de la commission d’enquête publique qui pointait notamment l’incapacité de ce PDU à réduire la circulation automobile et la pollution. Pas besoin de se forcer pour regretter l’inaction et le manque d’investissement…

Au final, derrière cette querelle de bac à sable concernant la présidence de Tisséo, se cache ce qui restera l’échec total et collectif de la majorité municipale : l’incapacité à impulser une politique de transport globale, ambitieuse et contemporaine des défis du 21ème siècle. Le coût de cet échec, ce sont ces centaines de vies perdues tous les ans à cause de la pollution automobile. Et plus on s’éloigne des transports publics, plus le FN progresse. Deux phénomènes qui méritent bien plus l’attention que de savoir qui est président de Tisséo, non ?

 

Chronique signée par Julien Faessel, ancien secrétaire d’Europe Ecologie les Verts à Toulouse que vous retrouverez un jeudi sur deux sur Toulouse Infos ou sur son blog .