Antoine Maurice, l’archétype du candidat à handicap

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Depuis le 28 septembre, les militants écologistes toulousains connaissent leur tête de liste pour les élections municipales de 2014. En effet, les 85 adhérents ayant participé au vote ont confié à Antoine Maurice la direction de la liste autonome d’Europe Écologie Les Verts. Retour sur ce choix et sur la personnalité de celui-ci avec Julien Faessel, ancien secrétaire d’Europe Ecologie les Verts à Toulouse. (Chronique publiée la première fois le 31 octobre 2013)

 

« Les Verts raffolent des candidats à handicap. Il faut entendre par là des candidats qui cumulent des caractéristiques qui leur porteront préjudice durant la campagne. Il s’agit d’une certaine façon de mettre en avant la différence, l’originalité et le « courage » d’un parti vert qui donne à ces occasions des arguments à ses détracteurs. EELV est en effet souvent présenté comme étant coupé de la population et constitué d’hurluberlus. Le choix d’Eva Joly par rapport à Nicolas Hulot est symptomatique de ce phénomène. Tout le monde est d’accord pour dire que Hulot est écologiste et bon communicant, cela était donc fort suspect pour le parti vert. Il était même ouvert à la discussion, quelle hérésie ! Au contraire, la méconnaissance des questions écologistes et un faible niveau de français, faisaient de la candidate à lunettes rouges un porte drapeau idéal pour être sûr d’aller droit dans le mur. Cela leur permet de se voiler la face, en rejetant sur un candidat boiteux l’échec d’une dynamique électorale d’ensemble. En effet, les Verts font habituellement des campagnes désastreuses, où l’idéologie, le dogmatisme et l’ethnocentrisme prennent le pas sur la réalité et sur l’objectif principal, qui est d’avoir un maximum de voix.

Qu’en est-il d’Antoine Maurice dans tout ça ? Les Verts n’avaient qu’un seul candidat valable pour Toulouse (Onesta). A partir du moment où ce dernier ne se présente pas, il semble évident qu’une liste autonome est suicidaire pour EELV et pénalisante pour le PS. Celle-ci s’est tout de même montée, et est dirigée de surcroit par un parfait inconnu. Un blog local avait d’ailleurs penché au printemps du côté d’antoine Maurice au prétexte de « tant qu’à prendre un parfait inconnu ». Nous pouvons toutefois douter de la capacité de ce dernier à mobiliser les Toulousains. Vrai bobo de centre-ville vivant le long des allées Jean Jaurès, Gersois d’origine mais n’en ayant ni l’accent ni la carrure et toujours bien habillé, Antoine Maurice a un profil qui n’en doutons pas fera fureur place Saint Pierre. Quel dommage que cette population soit trop jeune (ou encore trop saoule le dimanche) pour aller voter.

En interne de son parti, le désormais candidat Vert a su se rapprocher rapidement du sommet. Ami personnel de la « grand-chef » Duflot (tyran Duflot disent ses détracteurs, probablement des aigris), il a su montrer une efficacité certaine lors des congrès internes, où vote par procuration et langue de bois sont rois. Élu au « parlement interne » national d’EELV, Antoine Maurice a bien entendu soutenu les parachutages de ses copains, le non respect des statuts du parti (ceux qui imposent la proportionnelle d’habitude tant vantée), les pratiques douteuses de l’organisme de formation des élus verts, en gros, tout ce que décidait la chef. En contrepartie de cette docilité, il a dans son carnet d’adresse des ministres et des députés. J’entends d’ici des rabat-joies qui vont dire que tout ce beau monde a été élu avec le logo et les voix du PS. Volonté de nuire assurément, n’oubliez pas que les Verts présentent une liste autonome, preuve (parait-il) qu’ils ne sont pas un PRG vert. Mais quand on voit que même un sénateur PRG veut présenter sa liste à Toulouse, on se dit qu’il ne faut plus s’étonner de rien. Je suis néanmoins prêt à parier qu’antoine Maurice poussera sa liberté d’action jusqu’à attendre 22h15 du dimanche soir du 1er tour des Municipales pour appeler à voter PS. Et oui, quand on est un vrai radical c’est jusqu’au bout, on ne se refait pas.

Pour l’avoir côtoyé quelques temps, je pense pouvoir affirmer qu’antoine Maurice n’a pas un mauvais fond. D’ailleurs, je ne sais pas s’il s’est fâché avec grand monde ces dernières années. Sa présence naturelle, qu’il met si bien en valeur lors des conseils municipaux et communautaires pour féliciter le maire-président du succès de sa politique, en font un concurrent direct du fils Cujives au poste envié de meilleur cireur de pompes du Capitole. Les comptes rendus du groupe vert de ces conseils sont éloquents (disponibles sur leur site internet). On en vient à arrêter de chercher les divergences au vu d’une telle communion du groupe à « célébrer les beaux succès », à « l’auto félicitation », aux « réjouissances », devant «les initiatives saluées » et autres « approbations » qui remplissent ces comptes rendus. Notons toutefois pour être complet et pointilleux, qu’Antoine Maurice s’est fendu dernièrement d’une prise parole sans concession sur le projet de loi relatif aux métropoles, dénonçant (tenez-vous bien) « une réforme au milieu du gué ». Peut-être se voit-il député et a-t-il confondu l’Arche Marengo avec l’Assemblée Nationale pour produire une critique d’un projet de loi ? Mais à n’en pas douter, Pierre Cohen tremble encore aujourd’hui devant une telle radicalité dans le propos d’un de ses sujets qui d’habitude est si sage. Sinon pas de trace de critique, voire de réserve, par rapport à la politique municipale.

D’une certaine manière, avec un bilan personnel qui tient sur un demi post-it, Antoine Maurice serait gonflé de critiquer un maire qui lui a tout de même donné une vice-présidence de la métropole, et qui depuis n’a pas été trop regardant sur le travail réalisé. En réalité, ses véritables adversaires étaient ses propres collègues verts Élisabeth Belaubre et Philippe Goirand, qui ont amené le bio dans les cantines toulousaines et construits des pistes cyclables. Ces petits arrogants et leurs bilans sont heureusement aujourd’hui partis du groupe des élus verts. Ce groupe d’élus est d’ailleurs passé de 8 à 5 membres sous la présidence d’un Régis Godec bombardé directeur de campagne, et qui sera troisième de la liste. On a déjà donné des preuves plus convaincantes de la capacité à savoir bien s’entourer.

Personnellement, je pensais que la décroissance concernait l’économie, et non la taille des groupes politiques ou des scores électoraux. »

 

Chronique signée par Julien Faessel, ancien secrétaire d’Europe Ecologie les Verts à Toulouse que vous retrouverez un jeudi sur deux sur Toulouse Infos ou sur son blog http://julienfaessel.wordpress.com/.