Municipales 2014 : Pierre Cohen votera-t’il FN au premier tour ?

516

Comme nous l’avons vu lors des chroniques précédentes, Pierre Cohen ne se présentera pas en position de force pour briguer une réélection. La division de son camp et l’incertitude sur la quantité de reports de voix au second tour seront de sérieux handicaps. L’option FN devient de plus en plus intéressante pour les socialistes, à mesure que l’impopularité gouvernementale dope l’opposition. La présence du FN au second tour pénaliserait mécaniquement Jean Luc Moudenc. Mais cette stratégie est à double tranchant, et n’est pas forcément suffisante.

 

En me promenant au centre-ville il y a quelques jours avec un ami alsacien, j’ai eu droit à la question qui tue : « y a t’il un endroit sans travaux dans cette ville ? ». Il est vrai que la bière en terrasse avec vue sur la Garonne perdait de son charme au son du concerto de marteau-piqueur. Si l’électeur lambda a d’après certaines études une mémoire politique inférieure à 3 mois, il est probable que cette généralisation des travaux en fin de mandat ait laissée des traces. Le souvenir sera encore vif, et le risque est grand pour le maire de subir un chantage à l’inauguration, comme cela avait été le cas pour le lancement de la ligne de tramway fin 2010. Le bénéfice électoral est donc incertain puisqu’une grève ternirait la dynamique espérée de la fin des travaux. Notons que les premiers résultats visibles de ces travaux sont intéressants. Mais quel capharnaüm actuellement un peu partout, et quel timing curieux de mettre ainsi notre cité sans dessus-dessous aussi près des élections Municipales.

Cette fin de mandat ne redore donc pas  un blason déjà terni par les nombreuses déceptions liées aux promesses non-tenues de 2008. Il est très inquiétant pour l’équipe sortante de constater que de nombreux acteurs de terrains sont extrêmement déçus. Pour l’instant la majorité sortante explose en trois listes, une liste des quartiers sur le modèle Motivés se prépare, une liste anticapitaliste est probable, et le PRG menace d’une liste de centre-gauche de nuisance. Tout cet éventail de choix à gauche fera perdre de nombreuses voix à Pierre Cohen au premier tour, et rendra immanquablement une fusion de deuxième tour difficile et peu cohérente. La force du PS des années 2002-2012 a été de réussir à mobiliser l’électorat de gauche derrière lui, avec comme crédo de « battre la droite ». La présidence Hollande rend cet objectif moins mobilisateur pour une partie de l’électorat de gauche, critique vis-à-vis d’une gestion gouvernementale jugée « trop de droite ». Le talon d’Achille de Pierre Cohen est donc la non-mobilisation de ses « réserves », donc l’abstention de gauche.

Le FN peut être une parade à ce désenchantement, pour espérer une nouvelle victoire à l’arrachée, mais lors d’une triangulaire cette fois. La présence du FN au deuxième tour est très pénalisante pour la droite, qui en sort presque systématiquement perdante. L’exemple de la dissolution de 1997 perdue par le RPR est flagrant. Lionel Jospin n’avait du sa courte victoire qu’à la centaine de triangulaires, quasiment toutes remportées par la gauche plurielle (jusque dans des circonscriptions totalement improbables car fortement de droite). En 1986 déjà, François Mitterrand avait modifié le mode de scrutin pour utiliser le FN et minimiser la défaite de son camp aux législatives. Il est donc possible que dans certaines villes de France, le FN se révèle être une bouée pour un Parti Socialiste au bord de la noyade. Un tel scénario pourrait avoir lieu à Toulouse, même s’il n’est pas certain que cela suffise à compenser l’abstention « de punition » et le désenchantement de l’électorat de gauche. Une telle stratégie est toutefois extrêmement hasardeuse. N’oublions pas que Lionel Jospin a payé cher en 2002 la facture des triangulaires de 1997…

 

Chronique signée par Julien Faessel, ancien secrétaire d’Europe Ecologie les Verts à Toulouse que vous retrouverez un jeudi sur deux sur Toulouse Infos ou sur son blog http://julienfaessel.wordpress.com/.