Municipales 2014 : Le Fantasme de la liste commune rouge-verte

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La pastèque, verte dehors et rouge dedans. Tel a longtemps été le surnom des Verts. Les positions traditionnellement à gauche d’EELV et la récente vocation écologiste de Mélenchon ont donc laissé espérer aux journalistes et aux électeurs la possibilité d’une liste commune EELV-PG aux Municipales. Les récentes déclarations de Jean Christophe Sellin (le chef du PG local) vont dans ce sens, mais les réactions très mesurées des responsables verts traduisent bien le peu de volonté de s’unir au PG (Parti de Gauche).

 

Chacun voulant passer pour ouvert et rassembleur, le jeu est donc actuellement à EELV de trouver 1000 bonnes raisons justifiant de ne pas partir avec le PG. Et au PG, l’objectif est de placer la barre le plus haut possible, pour être gagnant dans tous les scénarios. Le 1er juin, EELV Toulouse a par exemple refusé de participer à une manifestation contre l’austérité tout en signalant être d’accord sur le fond… (des membres comme François Simon ou Patrick Jimena étaient tout de même présents). La raison invoquée/pleurnichée (au choix du lecteur) étant que les méchants du PG qui l’organisaient, n’avaient pas respecté un certain « guide des bonnes pratiques entre partenaires politiques ». J’ignorais l’existence d’un tel recueil. Mais gageons qu’il serve encore prochainement de prétexte pour refuser tout rapprochement, qui obligerait immanquablement à des compromis (brrr, des compromis, ça fait froid dans le dos). Un rapprochement risquerait également de menacer la place de tel ou tel apparatchik, actuellement confortablement installé. Un tel niveau de raisonnement digne d’une cour de maternelle n’aidera probablement pas à intéresser les toulousains à l’élection à venir.

 

Des ambitions différentes

Le raisonnement de Sellin, qui additionne les scores des sondages des listes EELV et PG est juste. Les électorats de ces deux formations sont proches, notamment à Toulouse, et n’auraient aucun problème à s’unir (voire  demandent cette union). Le problème est qu’une union faisant 20% au 1er tour n’est une aubaine que pour le PG, qui montrerait ainsi sa force vis-à-vis du PS. Ceci validerait en effet la ligne politique de Mélenchon de construire une alternative au PS. Au contraire, pour les Verts, ce serait une catastrophe puisque l’affaiblissement du PS signifierait leur propre disparition des assemblées. Du fait des modes de scrutins en vigueur en France, l’alliance inconditionnelle des Verts avec le PS est en effet un eldorado électoral*. Les objectifs des deux formations sont donc opposés. EELV veut montrer qu’il existe pour justifier les cadeaux du PS, le PG veut montrer qu’il est fort pour parler en égal du PS, et le remplacer à terme. La difficulté pour EELV sera de justifier de ne pas s’allier avec un partenaire au programme proche du sien (le PG) tout en s’alliant avec un partenaire au programme éloigné avec lequel au final il est souvent en désaccord (le PS).

 

Simon : le rassembleur ?

La question de l’éventuelle tête de liste commune est également un conflit de personnalité. Sellin est cordialement détesté par les Verts qui le méprisent. Onesta et Godec passent eux pour être trop de droite aux yeux des militants PG. Reste François Simon, qui pourrait potentiellement être un compromis. Il a récemment annoncé dans la presse sa volonté d’être en bonne place sur la liste verte. En langage Simon, cela signifie qu’il s’est remis de sa dernière défaite électorale (aux législatives cette fois). Il veut faire parler de lui, il vise probablement le Sénat sur une liste d’union avec les socialistes en septembre 2014 (petite précision pouvant être utile, une carrière politique s’envisage souvent sur plusieurs années, la présence à une élection pouvant en réalité servir à en préparer une suivante qui est le véritable objectif). Simon n’a donc rien à gagner à être tête de liste, d’autant plus d’une liste qui risquerait de menacer et critiquer sévèrement les socialistes. Sauf à risquer d’être confronté une nouvelle fois au rejet des électeurs toulousains qui ne veulent clairement pas de lui. Dans l’optique des Sénatoriales, Simon ne fera donc rien qui pourrait gêner les socialistes.

Pour toutes ces raisons, il est donc fort improbable qu’il y ait une liste commune rouge-verte à Toulouse. Le rapprochement serait pourtant logique (comme je l’explique dans un article précédent). Ces dernières années les actions communes ont d’ailleurs été nombreuses lorsqu’il s’agissait de s’opposer à l’austérité, au gouvernement de droite, etc. Mais les ambitions personnelles sont plus fortes. Le plus grotesque sera d’entendre les notables verts justifier leur logique illogique à l’aide d’exemples qui ne convainquent qu’eux-mêmes, afin de ne pas évoquer les vrais raisons de leur refus de rapprochement.

 

*Aujourd’hui EELV dispose de deux groupes parlementaires offert par le PS, au Sénat où EELV n’a pas assez d’élus locaux pour avoir un seul sénateur, et à l’Assemblée Nationale où seuls les Verts n’auraient aucun député (d’autant plus après la débâcle d’Eva Joly). Sans le PS, EELV n’aurait donc ni sénateur, ni député, aucun maire (hors petits villages), et très peu d’élus locaux (conseillers municipaux, généraux, régionaux).

 

Chronique signée par Julien Faessel, ancien secrétaire d’Europe Ecologie les Verts à Toulouse que vous retrouverez un jeudi sur deux sur Toulouse Infos ou sur son blog http://julienfaessel.wordpress.com/.