Alliance VITA : Le suicide assisté est-il un progrès de civilisation ?

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Le 18 décembre, le Professeur Didier Sicard a remis à François Hollande sont rapport sur la fin de vie. Isabelle Dacre-Wright, Déléguée d’Alliance VITA pour la Haute-Garonne revient sur les conclusions dans une tribune signée sur Toulouse Infos.

 

« Alliance VITA est au contact permanent des personnes confrontées à des fins de vie difficiles à travers ses services d’écoute. Aussi avons-nous suivi de près les travaux de la commission du Professeur Didier Sicard sur la fin de vie, et nous sommes particulièrement attentifs au contenu du rapport qui vient d’être remis cette semaine au Président de la République.

Il est important de saluer le sérieux de ce rapport, qui met en valeur les bienfaits de la démarche des soins palliatifs. Le rapport se prononce également fermement contre la pratique de l’injection létale, autrement dit un acte médical ayant pour but de provoquer la mort. Sur ces points, le rapport reste très en accord avec la loi actuelle sur la fin de vie, dont il encourage le déploiement à travers une formation accrue des personnels soignant et un développement des structures de soins palliatifs à domicile comme en milieu hospitalier.

Le seul point préoccupant de ce rapport est l’ouverture à une pratique encadrée du suicide assisté, qui devient l’un des trois axes de travail que François Holland a confié dès réception du rapport au Comité National Consultatif d’Ethique. Le suicide assisté consisterait à mettre à disposition d’une personne qui en fait la demande, un traitement provoquant la mort, mais ce serait à la personne de se l’administrer. Le dispositif en vigueur dans l’état américain de l’Oregon est cité en exemple par le rapport, pour ses critères stricts d’encadrement. En première approche, une telle pratique semble préserver l’interdit de tuer. Mais elle soulève de graves questions liées au suicide.

Le suicide fait parfois la une des journaux lorsque sa multiplication révèle un profond malaise dans le monde de l’entreprise, ou chez les jeunes. Il est à juste titre perçu alors comme un échec, révélateur d’une crise dont il faut trouver la solution. C’est pourquoi la loi française n’a jamais voulu considérer le suicide comme un droit : une personne qui fait une tentative de suicide ne peut pas se retourner contre celui qui la sauve, de même qu’une personne qui n’intervient pas face à une tentative de suicide peut être poursuivie pour non assistance à personne en danger. Plus encore, l’incitation au suicide est sévèrement punie par l’article 223-13 du code pénal. Faudrait-il voir ces mesures comme une atteinte à la liberté ? Non ! Elles sont la traduction d’une solidarité indispensable avec les personnes fragilisées acculées au désespoir.

Notre appréciation doit-elle différer pour les personnes en fin de vie ? L’approche de la mort, comme la maladie incurable, sont des épreuves majeures, qui peuvent générer angoisse ou désespoir, et méritent un accompagnement d’autant plus attentif et une solidarité accrue. Ouvrir la porte du suicide assisté à ces personnes serait les conforter dans le sentiment que leur angoisse est sans remède. L’inscription dans la loi d’un droit au suicide assisté constituerait donc un basculement de société majeur, en renonçant à affirmer à la personne désespérée qu’une autre issue existe que le suicide.

La question fondamentale qui est posée est de savoir si nous sommes tous également dignes d’être accompagnés dans nos détresses psychiques, ou si le désespoir est assimilé à une maladie incurable aboutissant à la mort. »

 

Tribune signée par Isabelle Dacre-Wright, Déléguée d’Alliance VITA pour la Haute-Garonne

 

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