A Toulouse, le Maire de la nuit dit « stop aux nuits noires »

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Quentin Fisset-Bonfanti, 21 ans, est mort dans la nuit du samedi 10 au 11 mai, poignardé devant un établissement toulousain. Une semaine plus tard, Christophe Cappelari, 28 ans, décédait dans des conditions similaires à Saint-Lys. Mercredi 18 juin, un étudiant a été retrouvé le crâne fracassé rue Lascrosses. La presse parle de série noire. Je parle de responsabilités, d’information, de campagnes de sensibilisation récurrentes pour amener une prise de conscience collective et un changement progressif de nos comportements la nuit.

 

La cause du dernier drame de la rue Lascrosses reste floue. Ce jeune homme, semble-t-il alcoolisé, aurait pu tomber sur le trottoir et être écrasé par un véhicule. Si l’on est alarmiste, nous pouvons nous interroger sur qui sera le prochain à tomber dans nos rues la nuit. Bien sûr, d’autres nous quittent le jour, victimes de maladie, d’accidents de la route… Mais ces décès nocturnes nous laissent perplexes et nous révoltent parce que les victimes sont agressées avec une lame, en pleine force de l’âge, avec une violence extrême, que ces assassinats surviennent après une bousculade, un mot de trop… parce qu’ils révèlent notre part de cruauté, d’inhumanité, nos failles, nos peurs, notre incapacité à gérer nos frustrations. Parce qu’aussi, cet ultime drame laisse à penser que l’alcool serait à l’origine du décès. Je l’ai largement souligné dans le Livre Blanc de la Nuit à travers les témoignages d’experts, entre autres, du CHU, de la Prévention routière… : nous sommes confrontés à un véritable problème de comportements la nuit à Toulouse.

 

La désolidarisation des groupes la nuit

Je me souviens, un soir, d’avoir discuté du décès de Quentin avec quelques jeunes. Je fus surpris de constater l’émotion toute relative que cela suscitait en eux : l’indifférence, la banalisation de la violence, le chacun pour soi me sont apparus. Le CHU de Toulouse, qui participe à la réalisation du Guide de la Nuit, sur lequel Toulouse Nocturne travaille, dressait récemment ce constat : « Les jeunes sortent en groupe, mais très rapidement, sous l’effet de l’alcool, ou plutôt de sa consommation excessive et rapide, ils repartent seuls. Le groupe se désolidarise et les jeunes deviennent des proies faciles. »

Outre le renforcement de la présence policière qui est à l’ordre du jour, la mise en place d’un dispositif de caméras de vidéo-protection plus étoffé, qu’il reste à chiffrer au regard de son retour sur investissement, le volet prévention des risques est primordial. Aussi, c’est avec satisfaction que j’ai appris que Olivier Delcayrou, directeur de cabinet du préfet de la région Midi-Pyrénées, préfet de la Haute-Garonne, s’est rendu jeudi 19 juin place Saint-Pierre et rue Gabriel Péri dans le cadre du lancement d’une campagne de sensibilisation contre les vols de téléphones portable et du dispositif de prévention « Fêtons plus, risquons moins ». Celui-ci vise, depuis 2011, à prévenir et à réduire la consommation excessive d’alcool et ses conséquences. Une initiative louable mais qui nécessite de la récurrence et de la visibilité, ce qui n’a pas été le cas jusqu’à maintenant. Toulouse Nocturne a constitué un Comité Scientifique qui rassemble le CHU, Médecins du Monde, la Prévention routière, le Rectorat, les Universités et les syndicats du métier dont l’UMIH (Union des métiers de l’industrie hôtelière), S.O.S Amitié… afin de travailler sur les contenus du Guide des usages de la Nuit destiné à tous pour la rentrée. J’ai rencontré les élus du Capitole concernés par le champ nocturne et pu constater leur intérêt pour que nous agissions ensemble. Il y a urgence à informer. Nous ne sommes plus dans le temps du constat et de l’interrogation d’un « faut-il une piqûre de rappel sur les risques de la consommation excessive ? », mais dans l’instauration d’un traitement quotidien préventif pour faire prendre conscience que les excès tuent la nuit et que nous devons la vivre autrement.

 

Christophe Vidal, président de Toulouse Nocturne, maire de la Nuit de Toulouse, éditeur du magazine Minuit