Festival du film Grolandais : la programmation de ce mardi

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Pour la deuxième année Toulouse accueille le festival du film indépendant. Si la première édition a été l’occasion de fêter comme il se doit les 20 ans de la Présipauté de Groland, la deuxième édition se recentrera sur ce qui fait l’intérêt et l’originalité de ce festival ; à savoir la promotion des films indépendants, impertinents, de  critique sociale et en rupture avec les codes habituels de la production cinématographique. Voici la programmation de ce mardi.

 

17h Charles Et Lucie + rencontre au Cratère

Charles et Lucie avec Ginette Garcin, Daniel Ceccaldi, Jean-Marie Proslier, Feodor Atkine, Henri Tisot, Pierre Repp, 1979, France, 1h35

La comédie à montrer coûte que coûte à vos bien-aimés à deux doigts de se flinguer. Écoutons Nelly Kaplan parler de son philtre revergondeur : «  Au début, Charles et Lucie ne sont que deux êtres noyés dans leur médiocrité qui ont perdu toute capacité de lutte. Ils ne vivent plus, ils durent ». Et ça empire encore quand ils se retrouvent en dessous de zéro, sans le moindre complice, sans un sou vaillant, sans une croquette pour se nourrir, sans un fil pour se couvrir (on leur a volé leurs fringues). N’est-ce pas là l’instant rêvé pour se mettre à réinventer sa vie sur-le-champ ? Dans la rigolade effrénée et advienne que pourra.

 

18h Ceci est mon corps + rencontre à l’ABC

Ceci est mon corps de Jérôme Soubeyrand – 2013 France 1h34 avec Jérôme Soubeyrand, Christophe Alévèque, Michel Onfray, Michel Serres, Bruno Clavier…

Un curé tombe amoureux d’une actrice névrosée dans un stage de thérapie, monte à Paris pour la retrouver et découvre l’auberge espagnole de l’amour et de la sexualité. Parallèlement à la fiction, Jérôme Soubeyrand interroge Michel Serres et Michel Onfray sur les fondements de la séparation du corps et de l’esprit dans le christianisme et se prête à une séance de psychanalyse transgénérationnelle avec Bruno Clavier, spécialiste mondial du genre. Ils interrogent ensemble le secret de famille que l’écriture de la fiction a contribué à mettre à jour : sa grand-mère est une fille de curé. Un récit à trois niveaux qui finissent par se rejoindre. Un hymne à la liberté du corps et de l’esprit, où s’entremêlent la réalité et la fiction. Première réalisation du scénariste Jérôme Soubeyrand, qui se donne entièrement dans ce rôle de curé en proie aux doutes et à l’appel de la chair, accompagné par des acteurs tout aussi fabuleux. Un objet filmique non-identifié aussi drôle que jouissif.

Précédé du court-métrage Nostradamos de Maxence Bradley, Alexandre Lampron et

Olga Tremblay (9mn)

 

 

18h Tip Top à l’ABC

Tip Top de Serge Bozon avec Isabelle Huppert, Sandrine Kiberlain, François Damiens, Samy Naceri, Karole Rocher… 2013 France 1h46

Le nouveau film de Serge Bozon est une véritable bombe aussi drôle que stimulante dans son non-conformisme. La brochette de célébrités réunie à l’affiche de Tip Top fait plus que s’encanailler dans cette enquête policière inspirée par un roman de Bill James. Deux femmes membres de la « police des polices » sont envoyées dans une petite ville du Nord pour enquêter sur la mort d’un indic’ algérien. Esther est une machine de guerre maniaque du mot « protocole » – plus que de sa substance – qui aime taper du poing sur les tables et sur son mari violoniste. Sally est une blonde godiche qui le jour, étudie de l’attitude d’Esther avec admiration et le soir, tire des délices sensuels de la vision d’un homme faisant la vaisselle en face de sa fenêtre. Isabelle Huppert et Sandrine Kiberlain rivalisent de génie anti-naturaliste dans leurs interprétations et font s’épanouir toute l’absurdité des dialogues.

 

19h  La fiancée du pirate + rencontre avec Nelly Kaplan au Cratère

La Fiancée du pirate  avec Bernadette Lafont, Michel Constantin, Julien Guiomar, Georges Géret, Claire Maurier, Louis Malle, 1969, France, 1h46

On ne se lasse pas de revoir ce brûlot féministe truculemment féroce, devenu culte, dans lequel la toute jeune Bernadette Lafont, en butte à la cupidité et aux «  principes moraux  » humiliants des notables d’un hameau, passe à la contre-attaque avec une explosive impudeur. Le film, mis à l’index par les cathos, choqua aussi bon nombre de critiques de gôche et d’intellos coincés du fion, car c’était à l’intérieur d’un genre dénigré en soi par eux, la farce paillarde, que Nelly Kaplan lançait son offensive poivrée contre l’hypocrisie bourge et le phallocratisme ambiant.

 

19h30 Danza de la realidad à l’Utopia Toulouse

La Danza de la realidad de Alejandro Jodorowsky avec Brontis Jodorowsky, Pamela Flores, Jeremias Herskovits, Alejandro Jodorowsky… 2013 Chili 2h10

« M’étant séparé de mon moi illusoire, j’ai cherché désespérément un sentier et un sens pour la vie.» Cette phrase définit parfaitement le projet biographique d’Alexandro Jodorowsky : restituer l’incroyable aventure et quête que fut sa vie. Né au Chili en 1929, dans la petite ville de Tocopilla, où le film a été tourné, Alejandro Jodorowsky fut confronté à une éducation très dure et violente, au sein d’une famille déracinée. Bien que les faits et les personnages soient réels, la fiction dépasse la réalité dans un univers poétique où le réalisateur réinvente sa famille et notamment le parcours de son père jusqu’à la rédemption, réconciliation d’un homme et de son enfance. L’un des cinéastes les plus fous de notre époque revient avec l’adaptation de son autobiographie. Après El Topo (1970) et La Montagne sacrée (1973), ses deux chefs d’oeuvre, il ne nous a pas été donné de voir un tel essai autobiographique depuis des lustres.

 

19h30 Soirée Cinématons et Groésie Cave Poésie

20h  Gro’Court programme n°1 ESAV

20h  Au nom du fils + rencontre (Vincent Lannoo, Philippe Nahon, Astrid Whett-

nall…)  à l’UGC

Au nom du fils de Vincent Lannoo – 2012 France/Belgique 1h20 avec Astrid Whettnall, Philippe Nahon, Achille Ridolphi, Zacharie Chasseriaud…

Elisabeth a tout pour être heureuse (lui) semble-t-il. Une famille aimante, portrait craché d’une famille modèle, un rôle actif et apprécié au sein de sa communauté et surtout, une foi inébranlable. Alors que la Paroisse doit se serrer la ceinture pour subvenir à ses frais de fonc-

tionnement, Elisabeth accueille au sein de son foyer le père Achille. La fréquentation au quotidien de cet homme d’église bien sous tous rapports devrait à n’en pas douter contribuer à élever moralement et spirituellement la petite famille. A moins que…

Lorsque la triste réalité surgit aux yeux de la mère (nous n’en diront pas plus), non sans avoir fait beaucoup de dégâts, celle-ci se lance dans une croisade sans merci contre l’Église, ses secrets et son hypocrisie et n’hésite pas à faire couler beaucoup de sang derrière-elle. Vincent

Lannoo nous revient avec cette satire féroce, à l’humour noir et au mauvais goût assumé. Un « revenge-movie » subversif et blasphématoire.

 

20h La légende de Kaspar Hauser à l’ABC

La légende de Kaspar Hauser de Davide Manuli avec Vincent Gallo, Silvia Calderoni, Elisa Sednaoui, Claudia Gerini… 2013 Italie 1h35

Une île rocailleuse baignée de soleil, époque indéfinie, un ailleurs. Un corps s’échoue sur la plage. C’est celui de Kaspar Hauser, le prince héritier mystérieusement volatilisé à l’enfance. Ce corps réanimé qui refait surface semble avoir perdu l’esprit. Son apparition trouble la routine insulaire. Qui est Kaspar Hauser ? Un souverain, un idiot, un imposteur ? Inquiète, la Grande Duchesse de l’île appelle à la rescousse son amant Pusher, dealer et tueur à gage. Inconscient de la menace qui pèse sur lui, l’étrange garçon apprend la vie auprès du Shérif… Un ancien DJ qui voit en lui le nouveau Messie. Whaouh… Voilà un réalisateur qui a du tourner aux acides. Kaspar Hauser, un être hybride en proie à une douce folie, le loufdingue Vincent Gallo, en shérif schizo et mélomane, sur une bande son de Vitalic, enrobant de leur musique planante ce noir et blanc de belle facture. Un film fauché aux relents psychédéliques. Allez hop on prend un acide et on va découvrir cette fantasmatique légende de Kaspar Hauser.

 

21h15 Néa + rencontre au Cratère

Néa avec Ann Zacharias, Sami Frey, Micheline Presle, Heinz Bennent, Françoise Brion,

Ingrid Caven, 1976, France, 1h47

Ayant accepté sans vergogne n’importe quoi, soit l’adaptation d’une nouvelle particulièrement raplapla de la très putassière romancière à la mode Emmanuelle Arsan, Nelly Kaplan détourne pernicieusement ici sa commande. Dans cet étrange film dédié à l’utopiste Charles Fourier, on retrouve au détour de chaque plan son aversion cinglante pour les bonnes mœurs et les génuflexions, et son goût très vif des fruits défendus. Nous sommes de surcroît quelques loustics à tenir une des séquences de Néa mettant aux prises son impétueuse héroïne avec Samy Frey comme un des moments les plus roboratifs de toute l’histoire du film subversif-carabiné. Rien que ça.

 

21h30 Cloud rock mon père à l’ABC

Cloud rock mon père (Beyond This Place) de Kaleo La Belle, avec Kaleo La Belle et

Cloud Rock, 2010, États-Unis, 1h35

« Stoned depuis 40 ans », voilà comment se décrit Cloud Rock, personnage hors norme de 70 ans. La drogue et le cyclisme sont les deux seules choses auxquelles il est resté fidèle. Son fils Kaléo ne l’a vu que deux fois depuis l’âge de 3 ans. Devenu adulte, il veut que son père lui rende des comptes. A travers les paysages grandioses de la région du volcan Mont-Saint-

Helens, Kaléo et Cloud entament un road movie. De l’épopée des mouvements hippies des années 60 et 70 jusqu’à leur histoire intime, les deux hommes reviennent sur des questions essentielles qui taraudent le jeune réalisateur : la parentalité et ses responsabilités. Entre les discours mystiques et fumeux d’un père resté perché et l’amertume d’un fiston qui règle ses comptes, le voyage ne sera pas de tout repos.

 

22h Wrong Cops à l’Utopia Toulouse

Wrong Cops de Quentin Dupieux – 2013 France/Etas-Unis 1h25 Vostf avec Mark Burnham, Eric Judor, Steve Little, Marilyn Manson, Grace Zabriskie, Daniel Quinn, Ray Wise, Jon Lajoie…

Los Angeles 2014. Duke, un flic corrompu et mélomane, patrouille dans les rues de Los Angeles, musique à fond et fait la rencontre d’un jeune amateur de techno, David Dolores Franck. Consterné par les goûts musicaux de l’adolescent, Duke s’investit d’une mission : lui donner une bonne leçon de musique. Duke est le premier d’une série de « mauvais flics » inoubliables : un obsédé sexuel qui abuse de son pouvoir, une femme flic maître chanteur fascinée par l’argent, un borgne difforme qui se rêve en DJ star. Ces personnages abjects vont se croiser et confronter en musique la médiocrité de leur vie, de leur morale dans l’atmosphère pré-apocalyptique d’une Californie fantasmée.

Après avoir présenté à Cannes une version courte, puis une autre un plus longue à Sundance, Wrong Cops est présenté en avant-première dans sa totalité au Fifigrot. Quentin Dupieux, cinéaste de l’absurde, nous livre une critique désopilante d’une Amérique en quête de sens.