Sanofi Toulouse : Un Mélenchon « bouillant de rage », se joint à la résistance

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Hier, le combat des Sanofistes a probablement réalisé son plus grand bond médiatique. Convié par le personnel, Jean-Luc Mélenchon est venu en personne se joindre à la résistance. Et planter, symboliquement, « l’arbre de l’enracinement de Sanofi à Toulouse ». C’est le premier homme politique de premier plan à se rendre sur le site depuis l’annonce de la restructuration. Indéniablement, la lutte des salariés toulousains vient de passer le cran au dessus.

 

S’il y avait un « jeudi de la colère » à ne pas manquer, c’était sans aucun doute bien celui-ci. Hier midi, il y avait l’engouement, l’enthousiasme, le surnombre parce qu’il y avait pour une fois un soutien de poids. Chaudement accueilli par des blouses blanches en ébullition, Jean-Luc Mélenchon s’est voulu chaleureux mais sobre. « Je ne m’impose pas. Si on ne m’avait pas invité, je ne serai pas là. Je ne viens pas récupérer, je me fais récupérer » a t-il d’emblée clarifié. Ce n’est que très récemment que l’élu a pris connaissance des détails du dossier. Devant le plan social qui menace toujours les six cent employés du site toulousain, il s’est dit « bouillant de rage ». D’un bagout assuré, l’homme a fait profiter de ses bons mots. « J’ai discuté avec l’inventeur du Plavix, qui n’a rien perçu pour sa découverte, ce qui d’ailleurs ne lui pose pas problème. Son métier le passionne avant toute chose. Cela prouve que la cupidité n’est pas le seul moteur des activités humaines. La cupidité est une névrose chez certains qui adoptent des comportements de criquets ». Ciblés, les actionnaires de Sanofi n’ont pas échappé aux prunes métaphoriques du maître « quenelleur ». « Ces gens-là ne font que dépecer, ils seraient parfaits pour la boucherie » a t-il persiflé, remportant une foule hilare. Des enjeux éthiques ont également émergé du discours. « La question est de savoir quelles sont les valeurs que nous mettons au cœur de la société. Aujourd’hui, l’argent est l’unique critère, l’absurde critère. Le coût du capital, c’est le moindre intérêt humain ».

 

Et maintenant?

Mardi dernier, le comité central d’entreprise du groupe a annoncé la suppression de 900 postes en France. Bien moins que la fourchette de mille à deux mille emplois supposée. Le cas du laboratoire toulousain a été lui considéré comme spécifique. Des réunions exclusivement consacrées à celui-ci devraient être programmées. Outre l’effet Mélenchon, c’est aussi cet aspect contextuel qu’il fallait relever. Mais pour Mohamed Boukhris, technicien du bord au site, la donne n’a que peu changé. « Il n’y a pas vraiment un regain d’espoir puisque ces 900 postes ne concernent pas les effectifs toulousains. Si Sanofi se désengage du site, les suppressions seront portées à 1500 » explique l’homme, qui voit néanmoins la visite du député européen d’un bon œil. « C’est encourageant, on voit bien que la venue d’un politique déclenche beaucoup plus de choses. Cela peut permettre une meilleure médiatisation du cas Sanofi et que les gens prennent conscience de la situation ». Cette dernière est pour Jean-Luc Mélenchon d’importance nationale. « C’est une bataille pour l’intérêt d’une société. La France a investi énormément sur son industrie pharmaceutique. Elle ne doit pas la laisser se faire détruire par des gens venus des Etats-Unis qui n’y connaissent rien ». Le frondeur de gauche a esquissé des possibilités de contre. D’une part, via la mise en place d’une loi interdisant les licenciements boursiers, récemment déposée par un sénateur. De l’autre, par la reconnaissance de droits nouveaux pour les travailleurs, dont celui de véto pour les comités syndicaux d’entreprise. « Nous faisons face aujourd’hui à un cancer financier. Et la molécule contre ce cancer, c’est la lutte! » a t-il fanfaronné. L’amoureux des petites formules venait une nouvelle fois de frapper.

 

Christophe Guerra