AZF: « la seule décision acceptable serait la réouverture de l’enquête »

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Contrairement à d’autres, l’association de victimes « AZF Mémoire et Solidarité » répondra présente à la commémoration officielle du onzième anniversaire de l’explosion de l’usine. Elle espère enfin connaître la vérité à l’issue du procès en appel, dans le cadre duquel elle s’est constituée partie civile. Son président, Jacques Mignard, attends le délibéré du 24 septembre prochain avec impatience. A quelques jours d’un verdict crucial, l’homme a bien voulu répondre à nos questions.

 

Toulouse Infos: « Que symbolise pour vous la commémoration de vendredi et la création de ce mémorial ?

Jacques Mignard: C’est pour nous la journée du souvenir et de la solidarité. Le 21 septembre 2001 sera à jamais ce jour noir où nous avons perdu nos collègues, notre travail et notre usine. Dans la mesure où nous avions déjà organisé plusieurs rassemblements depuis la catastrophe, c’est aussi l’occasion de se retrouver. De partager des souvenirs, des expériences et de se serrer les coudes.

 

T.I: Entre les différentes associations de victimes, il semblerait que des divergences soient apparues. Quelles relations entretenez-vous avec elles?

J.M: Il existe en effet des désaccords de fond entre les associations. Certaines se satisfont de la thèse officielle et ne souhaitent que la désignation des responsables. Nous, nous sommes avant tout dans une démarche de recherche d’explication, nous voulons la vérité. Avec d’autres, les relations sont simplement inexistantes. Des associations comme les Sinistrés du 21 septembre sont récupérées par des microcosmes politiques. Elles sont utilisées pour diffuser des idées très tranchées et faire le procès du grand capital que représente Total. Il y aussi ces collectifs bobos/écolos qui veulent fermer toutes les usines et que l’on revienne au temps des cavernes à faire cuire du gibier. Cela ne nous intéresse pas, nous n’avons rien à nous dire.

 

T.I: La constitution de Mémoire et Solidarité en tant que partie civile a été contestée, notamment par ces associations. Pour quelles raisons?

J.M: Dès le départ, le procureur a fixé la responsabilité de l’usine et le procès n’a cherché qu’à valider une thèse indémontrable. Nous disons et nous prouvons que l’explication officielle de la catastrophe ne tient pas. Par conséquent, puisque nous ne soutenions pas l’accusation, certains ont considéré que nous n’avions pas à être parties civiles. En d’autres termes, notre qualité de victimes est reniée. Maitre Carrère, l’avocat des Sinistrés du 21 septembre nous l’a clairement dit: une partie civile ne peut aller qu’à l’appui de l’accusation.

 

T.I: Que pensez-vous de l’étude publiée dans la revue Préventique, qui défend un tout autre scénario de l’explosion?

J.M: Si nous avions eu la réponse aux questions posées, nous n’en serions pas là. L’enquête de Préventique serait soit validée, soit évacuée. Dans l’affaire AZF, les investigations ont été insuffisantes et les compléments d’information que nous avons demandé refusés. Logiquement, les portes sont aujourd’hui ouvertes à tout. Quant aux détails présentés dans cette étude, ils restent à démontrer et ne constituent pas pour l’heure des données objectives de la situation. »

 

T.I: Comment appréhendez-vous le délibéré du 24 septembre?

J.M: C’est très difficile à dire…Juridiquement, des responsables peuvent être désignés. Mais que l’on aboutisse à une condamnation ou à une relaxe, le problème sera le même. Il restera des questions essentielles sans réponses. Je le répète, ce qui est primordial pour nous est de connaître la vérité. Ce que je peux vous assurer, c’est que nous dirons ce que nous aurons à dire. La seule décision acceptable de notre point de vue serait la réouverture de l’enquête.

 

Propos recueillis par Christophe Guerra