Coup de tonnerre : les commerces de cigarettes électroniques pourraient disparaître

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Le verdict est tombé à 16 heures ce lundi 9 décembre : la cigarette électronique est un produit soumis au monopole des buralistes et ne peut pas être vendue en dehors de ce cadre. Un simple procès pour concurrence déloyale a provoqué « un coup de tonnerre » dans l’univers de l’e-cigarette, même si à l’heure actuelle rien n’est mis en application.

 

L’histoire commence par un litige entre un buraliste de Plaisance-du-Touch et un commerçant de cigarettes électroniques installé en juin en face du bureau de tabac et possédant une autre boutique à Colomiers. Les deux commerçants proposent à leur clientèle ce nouveau produit en vogue, mais pas de la même manière. Considérant que « la boutique concurrente faisait librement la promotion de produit assimilé au tabac, alors que la loi l’interdit », le buraliste a assigné son voisin pour concurrence déloyale.

Le verdict rendu hier a tranché sur la question et provoqué un vrai coup de tonnerre sur le monde de l’e-cigarette. En effet, le tribunal a ordonné à la SAS Esmokeclean de « cesser toute promotion ou propagande des cigarettes électroniques et e-liquide, aussi bien sur les commerces que sur les sites internet et page Facebook ». Mais le nœud de la discorde provient du paragraphe suivant, ordonnant aux boutiques de « cesser la vente des produits, sur site ou sur internet, car considéré comme soumis au monopole des buralistes », enfin la société a été condamnée à verser 3500 euros.

Le buraliste, membre de la confédération des buralistes de France, se dit heureux de la décision et rappelle « que ce n’est qu’une juste application de la loi ». « Les vapoteuses, ou cigarettes électroniques, sont un bon moyen pour nous de survivre face à la hausse du tabac. Il y a écrit le mot tabac partout dans les sites ou dans les boutiques de nos concurrents, donc que l’on ne nous dise pas que c’est autre chose ». « C’est un palliatif et un curatif aux cigarettes, il contient certes de la nicotine mais surtout majoritairement des arômes alimentaires. Nous sommes bien loin des produits des marchands de morts », s’indigne Pirat Reynald, gérant de l’une des deux boutiques d’e-cigarette. Dès l’annonce du verdict, l’avocat à décidé de faire appel et compte bien faire entendre raison aux juges. « Ce n’est pas moins de 1500 boutiques et de nombreux sites internet dont nous parlons », explique-t-il.

 

La fin des commerces d’e-cigarettes ?

À l’heure actuelle, il existe un vide juridique en matière de vapoteuses, et personne ne savait qualifier le produit. C’est dans ce contexte que les juges de la chambre de commerce de Toulouse ont tranché. « Je ne comprends pas, on me laisse ouvrir ma boutique, et à présent on me fait fermer avec en prime un trou de 3500 euros dans ma comptabilité », déplore Pirat Reynald qui ironise en expliquant que « c’est moi qui aurait dû attaquer mon voisin pour concurrence déloyale car il vendait des e-cigarette ». Le buraliste rappelle que de son côté qu’il propose à la vente ce produit depuis 4 ans et possède « un espace dédié dans le magasin ». À l’heure actuelle, I Smoke Clean compte aller le plus loin possible afin de faire « entendre raison », et espère qu’une loi sera votée entre temps pour « qu’un métier professionnel existe et se démarque, mais soit différent de celui de buraliste ».

Reste que la décision du juge est suspensive et que le procès étant à présent en appel, la fermeture n’interviendra pas avant la fin de tout le processus judiciaire. Les deux avocats sont en désaccord quant à la possibilité de jurisprudence ou non de ce rendu de justice, l’un expliquant « qu’elle le deviendra lorsque la Cour de cassation aura rendu son verdict » alors que l’autre parle « d’une jurisprudence immédiate, et de nombreux cas similaires sont à venir  ».

A Toulouse, les autres commerçants se disent « furieux » de la décision. « Ce n’est pas normal, voir inadmissible, on cherche à casser notre commerce car il est en vogue » explique Alexandre de la boutique Delismoke. « Ce n’est pas une cigarette, ça ne fonctionne pas pareil, et c’est une alternative pour arrêter de fumer. La loi est en retard sur ce point » continue-t-il. Il explique que les vendeurs ne se laisseront pas faire et réagiront pour sauver le secteur. « C’est aussi stupide que l’histoire des encres de tatouage » conclut le patron d’I Smoke Clean.

 

Article de François Nys