Sans-abris : « à Toulouse, nous arrivons au point de rupture niveau hébergement »

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A la veille d’un hiver qui approche à grands pas, le nombre de personnes à la rue atteint un seuil critique. C’est l’inquiétant constat du Collectif Inter-Associations de Toulouse, parmi lesquels figurent notamment Emmaus, la Croix Rouge ou encore les Restos du Coeur. Selon lui, les travailleurs sociaux du 115 ne seraient plus en mesure d’assurer leurs missions d’entraide et de logement. La sonnette d’alarme est tirée.

 

« Le manque de places d’hébergement est crucial » tonne Geneviève Geneve. Pour la présidente du Collectif Inter-Associations Toulouse, les choses se dégradent de plus en plus. « Actuellement, trois à quatre cent personnes à la rue demandent un logement. C’est le seul chiffre sur lequel nous puissions nous baser, mais autant dire qu’il est bien moindre qu’en réalité. Nous arrivons aujourd’hui à un point de rupture. Il faut que l’Etat prenne la mesure de l’urgence et mette en regard les budgets nécessaires ». Une situation qui affecte aussi les travailleurs sociaux, exaspérés par les conditions de travail. Si bien que depuis jeudi, la plupart d’entre eux ont fait valoir un droit de retrait. « Nous sommes tous vraiment mal » lâche fébrilement Stéphane Robert du 115. « Nous faisons 95% de rechutes, ce qui signifie que nous laissons jusqu’à 160 personnes à la rue par jour. Nous bidouillons parfois avec les foyers pour obtenir des places d’une nuit, mais c’est insuffisant ». Selon lui, le moral des troupes est au plus bas. « Nous n’avons plus les moyens de faire notre boulot. Les usagers pestent contre nous et c’est au fond normal. Le CCAS, notre employeur, ne fait aucune proposition concrète devant cette souffrance. C’est pourquoi depuis jeudi, nous faisons nos heures de travail mais nous n’assurons plus nos fonctions ».

 

Et pendant ce temps là, une nouvelle expulsion…

On prend les mêmes et on recommence. Hier matin, vers 7h20, le Centre Social Autogéré situé rue Demouilles a été évacué par les forces de l’ordre. Si l’intervention s’est à priori déroulée sans violence, la logistique utilisée sentait l’opération coup de poing. A l’aide d’un hélicoptère, des gendarmes sont d’abord descendus en rappel sur le toit. Instantanément, une quarantaine de camion de police, épaulés par des CRS de Bordeaux, ont cerné les lieux. Plus de deux cent policiers ont été mobilisés pour déloger les occupants. Soit 26 personnes présentes à ce moment-là, selon Thomas, l’un des occupants. « Nous étions une centaine à vivre dans ces locaux. Pour ainsi dire, une centaine à se retrouver dans la mouise. Nous allons essayer de s’héberger les uns les autres en attendant de réinvestir un local » grince le jeune homme. « Aucune rencontre n’a été faite avec les occupants pour trouver une solution adaptée » déplore Geneviève Geneve. « L’expulsion n’en est évidemment pas une, surtout lorsque l’on voit la façon dont ça a été fait » rajoute la coordinatrice. Une chasse aux squatteurs qui n’est pas prête de se terminer, comme l’explique Matouf du collectif Crea. « Il n’y a pas d’argent pour le logement, mais apparemment, il y a du pognon pour faire la guerre aux pauvres ».

 

Christophe Guerra