Tabac : les projets européens font fulminer les buralistes toulousains

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Etudiée au parlement européen, la généralisation des emballages « neutres » est en train de mettre le feu aux poudres. Les nouvelles directives pensent également à supprimer la publicité pour le tabac. Plus encore, à rendre les paquets de cigarettes invisibles des clients. A la veille d’une énième hausse des prix, les buralistes locaux enragent et le font savoir.

 

Bruxelles commence sérieusement à leur « prendre le chou ». Prévue en octobre, l’augmentation du prix du paquet de quarante centimes est source d’irritation pour les gérants. Craignant l’explosion d’une contrebande déjà extrêmement nuisible, nombre d’entre eux dénoncent une mise à mort pure et simple de leur activité. Première grande ville après la frontière espagnole, Toulouse semble sous la menace directe d’une expansion du trafic. Par ailleurs, les buralistes s’opposent à l’uniformisation des paquets, c’est à dire blancs, sans marque ni distinction. La ministre de la Santé souhaite amputer ceux-ci d’un visuel attractif auprès des jeunes et soutient la directive. Selon Gérard Vidal, président régional de la fédération des buralistes, c’est du pain bénit pour la contrefaçon. « Cela va faciliter le travail des contrefacteurs dont la principale difficulté était d’imiter le logo et les couleurs » grogne t-il. « Le marché parallèle est envahi par des cigarettes dont l’intérieur, nous le savons bien, est tout sauf du tabac. Les acheteurs attraperont des cancers plus vite. En favorisant la falsification des cigarettes, l’Etat est en contradiction totale avec la politique de santé publique qu’il prétend mettre en œuvre » poursuit celui qui est aussi le gérant du tabac des Sept-Deniers. En signe de protestation, il recouvre depuis ce matin tous les paquets de son linéaire d’un rideau blanc. Dans chaque département, un bureau de tabac en fait actuellement de même.

 

« De la politique de santé spectacle »

Dans les chiffres, 21% des fumeurs achètent leur précieux sésame sur le marché noir. Pour l’Etat, c’est un manque à gagner d’environ 3 milliards d’euros. La vente légale de cigarettes lui en rapporte treize, soit une captation de plus de 80% des bénéfices. Détourner les fumeurs des bureaux de tabac par l’outil législatif peut donc paraître paradoxal. Pas tant que ça pour Gérard Vidal, qui voit clair dans la manœuvre. « S’ils se préoccupent vraiment de la santé des consommateurs, ils n’ont qu’à interdire la vente. La vérité est que le gouvernement cherche seulement à se donner bonne conscience, c’est de la politique de santé spectacle » s’étrangle t-il. « Nous sommes conscients de la nécessité d’une politique de santé publique. L’accentuation de la prévention est souhaitable et nous sommes prêts à la soutenir. Mais combattre l’addiction par la hausse des prix n’est évidemment pas la bonne solution. Il faut que l’on tienne compte de la fragilité de nos enseignes, qui restent en milieu rural les derniers commerces multi-services de proximité ». Déterminé à préserver la profession mais aussi ces établissements, l’homme prévient. « En 2003, lorsque les prix ont augmenté de 40%, nous étions 20 000 dans les rues de Paris. S’il le faut, nous le referons à Bruxelles ».

 

Christophe Guerra