Tensions à Thales Toulouse : « Le médecin du travail a décelé des idées suicidaires chez certains salariés »

770

Une soixantaine d’employés ont bloqué hier l’entrée du parking du site de Basso-Cambo. Thales Services, qui procède au remaniement de ses effectifs, projette de muter certains de ses ingénieurs vers l’entreprise GFI. Ceux-ci craignent pour leur statut et redoutent un plan social déguisé.

 

A Toulouse, les vagues de manifestations se succèdent et se ressemblent. Thalès Services, société spécialisée dans les systèmes d’informations critiques, procède à la revue de ses coeurs de métiers. C’est pourquoi elle négocie depuis un an avec l’entreprise GFI en vue de lui céder sa branche informatique Business Solutions. Concrètement, ce plan implique le transfert collectif de 130 ingénieurs toulousains. « Nous n’avons été ni informés ni consultés. Mais nous savons que les salaires et les statuts de GFI sont inférieurs aux nôtres. Certains d’entre nous ont d’ailleurs préféré démissionner » explique Philippe Chrétien, délégué syndical CFDT à Thalès. « La loi dit que l’entreprise d’accueil ne peut se séparer des salariés mutés avant quinze mois. Passé ce délai, GFI pourra faire comme bon lui semble, pousser à la démission par exemple. Les échos que nous avons sur leurs méthodes sont assez mauvais » confie Jean-Michel Decatoire, délégué syndical CFE-CGC. « Pour la direction, il y a plus d’avenir pour les salariés transférés que pour ceux qui restent. C’est le leitmotiv que l’on nous ressasse toujours ».

 

« Des gens craquent »

En attendant, la pression monte et devient palpable. « Le médecin du travail a reçu plusieurs salariés de Thalès. Pour certains d’entre eux, il a décelé des idées suicidaires. Il y a des gens qui craquent. C’est une situation qui dure depuis trop longtemps » explique t-il. « Nous tentons d’interpeller l’État autant que nous le pouvons. En tant qu’actionnaire du groupe, il a une part de responsabilité ». Mais c’est l’initiateur du plan de remaniement, Luc Vigneron, qui semble cristalliser les rancœurs. « Notre PDG n’est pas vraiment homme de dialogue. Quand quelque chose gène sa stratégie, il l’écarte tout simplement. Plusieurs responsables de sections en ont fait les frais. Demain, d’autres entités de Thales subiront des décisions semblables » pronostique t-il. « Les plans sociaux sont de plus en plus fréquents. Ils ont été retardés le temps des élections, mais cela reprend de plus belle » regrette Annie-France Lair, secrétaire CFDT Métallurgie de Haute-Garonne Ariège. Pour autant, les ingénieurs ne sont pas résignés et restent déterminés à se faire entendre. « Il existe des jurisprudences permettant de faire casser le transfert. Nous sommes fatigués, mais nous gardons espoir » relativise Philippe Chrétien. La décision sera rendue le 14 septembre prochain par le tribunal de grande instance de Versailles.

 

Christophe Guerra