Hervé Couasnon, « artiste », rebelle, fuit l’internement depuis des jours

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Nouveau coup d’éclat d’Hervé Couasnon, cet activiste interné à l’hôpital psychiatrique de Toulouse, le 3 mai dernier, pour avoir déjoué la sécurité de l’aéroport de Blagnac et s’être introduit sur le tarmac. Estimant son internement « abusif », il s’est enfui de l’établissement, samedi 1er juin. Depuis, il est chez lui, à Périgueux, et craint à tout moment l’arrivée des forces de l’ordre. Epopée d’un personnage incontrôlable.

 

« J’ai choisi l’angle mort des caméras de surveillance et je suis parti de l’hôpital. J’ai pris le bus, puis le tram, et enfin le train jusqu’à Bordeaux. Après, je suis monté dans un taxi jusqu’à Périgueux », a expliqué Hervé Couasnon, lors d’une conférence de presse donnée le lendemain de son évasion. Dès son arrivée, il a en effet contacté plusieurs journalistes de la région pour dénoncer publiquement son « internement abusif ». L’hôpital psychiatrique Gérard Marchand n’a pas souhaité réagir à cette évasion. Il n’en reste pas moins qu’Hervé Couasnon « peut être ramené à tout moment sur Toulouse », révèle son avocat, Me Pierre-Daniel Lamazière. La question se pose sur la réalité de son état psychiatrique : nécessite-t-il vraiment le placement en HP ? Après les faits du 3 mai dernier, le préfet de Haute-Garonne, et le Procureur de la République de Toulouse, ont décidé conjointement l’internement d’office. Le  juge des libertés et des détentions, systématiquement saisi dans ce cas, entérine la décision.  L’appel intenté n’a fait que confirmer le jugement de première instance. « Les juges estiment qu’il est versatile, ce n’est pas un motif d’enfermement ! Hervé Couasnon n’est pas fou, il n’est pas dangereux. On a l’impression que les motivations sont davantage punitives que médicales », s’indigne Me Lamazière. L’intéressé a lui-même évoqué ce point dimanche dernier : « Selon eux (les psychiatres, ndlr), je souffrirais d’une double personnalité. Mais la bipolarité est juste un prétexte pour me garder. Je suis gênant. Je n’ai commis aucun crime. » L’affaire va être portée devant la Cour de Cassation. En attendant Hervé Couasnon est chez lui depuis samedi dernier. Déterminé à ne pas revenir sur Toulouse, « il a toujours demandé à être soigné à Limoges, où il connait un psychiatre qui le suit depuis 20 ans », précise Me Lamazière. Ce qui signifie tout de même qu’il a besoin d’un suivi médical… « Je ne peux pas vous dire exactement ce qu’il a car c’est couvert pas le secret médical. Mais ça ne l’empêche pas de vivre, d’exercer son travail de chauffeur de bus et d’avoir une vie sociale paisible. »

 

Action de folie, coup médiatique ou œuvre artistique ?

Deux expertises ont abouti à la conclusion que ce « poète-escaladeur », tel que le nomme les médias, devait être interné. Il faut dire que son intrusion à l’aéroport Toulouse-Blagnac n’est pas son seul fait d’arme. En 2002, il réussit à s’introduire dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale pour remettre une coupe sportive à Jean-Pierre Raffarin, alors Premier-ministre. Il est neutralisé par les huissiers. Un an plus tard, il est interpellé sur le toit de l’ambassade américaine sur lequel il s’était perché pour distribuer des tracts. Le poète s’est également fait remarqué en 2012 en pénétrant dans la centrale nucléaire de Civaux, à Vienne. Après son interpellation à Blagnac, Hervé Couasnon a déclaré vouloir atteindre le cockpit « pour diffuser un message de paix ». Etrangement, son avocat n’a pas la même interprétation de ces faits : « Au sens juridique, ces actions, de par leur originalité, sont des œuvres de l’esprit. Ces performances ont un petit côté artistique. » Au-delà de cet aspect, Me Lamazière avance que son client « veut avant tout réaliser des actions médiatiques dans le but de montrer la défaillance des systèmes de sécurité. » Pas impossible d’y voir  même une visée politique. En effet, Hervé Couasnon s’est déclaré candidat aux présidentielles de 2007 et 2012, en prônant notamment des idées anti-nucléaires. Faute des 500 signatures, il a dû renoncer à son projet élyséen. Pour l’instant.

 

Article de Vénus Doris