Sans papiers : « Une régularisation massive est inévitable »

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« La réglementation législative sur l’immigration doit changer. Entre Sarkozy et Hollande, il n’y a eu aucune différence, aucune rupture. C’est de l’immobilisme chronique», constate Pierre Grenier, délégué régional de la Cimade. Cette association d’entraide aux migrants et aux réfugiés déplore la situation sur le terrain, et le centre de rétention de Cornebarrieu cristallise cet alarmisme.

 

Depuis l’arrivée du nouveau gouvernement, la Cimade vient d’être reconduite dans l’attribution du marché public de l’assistance juridique dans le centre de rétention de Cornebarrieu pour une période courant jusqu’au 1er janvier 2014. La seule association autorisée à entrer dans les centres de rétentions administratifs, attendait du changement dans les conditions de rétention des personnes étrangères mais elle constate, aujourd’hui, « un système qui marche sur la tête » et  qui va « à l’encontre de la volonté annoncée de rompre avec la politique du chiffre ». Entretien avec Pierre Grenier, délégué régional de la Cimade.

 

Toulouse Infos : Quelle est la situation dans le centre de rétention de Cornebarrieu aujourd’hui ?

Pierre Grenier : Depuis 1984, avec la légalisation des centres de rétention administrative, la Cimade a obtenu le droit d’intervenir auprès des étrangers retenus afin d’y représenter la société civile et de les aider dans l’exercice de leurs droits. Mais depuis cette période il n’y a eu que des ajustements, pas de d’actes de réformes de grande ampleur. La situation stagne dans tous les centres de rétention de France. Il y a un dialogue avec l’Etat, mais on veut plus, on attend des actes.

TI : Qu’attendez-vous du gouvernement et de sa politique d’immigration ?

PG : Nous n’attendons rien, c’est les migrants, les réfugiés et les retenus qui attendent. Ils aspirent à la dignité comme tout un chacun. Pour les migrants, il y a une grande déception, ils espèrent que la situation va changer rapidement. La Cimade est là pour les soutenir. Ces dernières semaines, des situations particulièrement inhumaines ont eu lieu. Il y a un décalage avec les discours affichés d’un gouvernement de gauche. Un algérien vivant depuis 2000 en France s’apprête à être reconduit dans son pays du jour au lendemain sans lui laisser de temps, c’est une situation quotidienne pour des centaines de migrants. Point positif, il n’y a plus de politique du chiffre, et dans la pratique, les interpellations sont moins nombreuses. Mais le système doit changer, l’accueil des immigrés doit être repensé, on prône la refonte de l’ensemble de la réglementation législative sur l’immigration, qui doit suivre l’évolution de la société.

TI : Face à votre constat, que préconisez-vous ? Quelles sont vos actions, vos solutions ?

PG : Nous pensons toujours associatif. Les représentants de la société civile se doivent d’avoir un rôle de contre-pouvoir et de vigie. Nous défendons notre indépendance et notre liberté de parole. Les règles ne vont pas changer du jour au lendemain mais il y aura une inévitable régularisation massive, elle devra être contrôlée et cohérente. La Cimade œuvre quotidiennement pour aider les opprimés, déconstruire les stéréotypes et mettre en avant le rôle social et culturel qu’apporte un citoyen immigré dans notre société. On veut toucher le grand public sur ces questions là à travers nos 40 propositions.

 

Article d’Alexandre Blenzar