Le Centre Social Autogéré (CREA) de Toulouse évacué ce matin

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Le centre d’hébergement social autonome, situé sur l’allée des Demoiselles, vit ses dernières heures. Ce matin, les forces de l’ordre tentent de déloger les occupants sur feu vert de la préfecture. En attendant « l’ouverture » de nouveaux bâtiments, ce sont une quarantaine de personnes qui risquent de retourner dans la rue.

 

« Ici, des enfants vivent heureux ». C’est l’une des banderoles observables depuis l’extérieur de l’immeuble, les anciens locaux de l’Afpa. Un « squat social » qui décidément tranche avec les stéréotypes. Des cours de boxes, des concerts, du soutien scolaire et d’autres activités ont lieu dans des salles communes. Un autre bâtiment est réservé lui aux logements. Derrière les murs, ce sont des familles, des travailleurs précaires, des étudiants ou des demandeurs d’asile. Matouf, l’un des occupants, explique les démarches conjointes du centre et du Crea, le Collectif de Réquisition, d’Entraide et d’Autogestion. « Sans nous, ces gens dormiraient dans la rue. L’Etat prétexte un manque d’argent et ne fait rien pour eux. Le mépris est absolu. C’est pourquoi nous faisons les choses par nous-mêmes sur les principes de l’entraide et de la solidarité ». Cette entraide, comme tient à le souligner Matouf, provient aussi de l’extérieur. Par exemple, celle d’employés EDF qui viennent d’eux-mêmes rétablir le courant quand celui-ci est parfois coupé. Celle aussi d’associations, de collectifs qui les appuient. « Nous réhabilitons des locaux laissés à l’abandon. Nous gérons tout nous-même et ne demandons aucune subvention. En clair, nous ne posons de problèmes à personne » défend t-il. Et pourtant. Sur décision du tribunal administratif de Toulouse, rendue en juillet dernier, le centre social autogéré fermera bel et bien ses portes. De gré ou de force.

 

Tentatives d’incursions policières

« Cela fait quinze jours que l’on vit en attendant les flics tous les matins. Les autorités ne sont pas obligées de communiquer une date d’expulsion précise et elles jouent là-dessus » déplore Matouf. « Elles prétendent vouloir créer ici un foyer d’accueil avant l’hiver et c’est pourquoi elles nous expulsent. Or, lors de notre second procès il y à deux mois, le juge a démontré l’inexistence de ce projet. Récemment, la préfecture a elle-même reconnu par téléphone que cette création était techniquement impossible en terme de délais. » Selon lui, les forces de l’ordre usent de moyen illégaux pour mettre des gens à la rue. En théorie, passés deux jours d’installation, des occupants ne peuvent effectivement être délogés par la police. Dans un communiqué publié le 20 août dernier sur le site de l’association GPS, le Crea rapporte une tentative d’incursion policière dans les locaux du CSA. Matouf confirme les faits. « Une commission sécuritaire incendie est venue, accompagné d’un policier en civil. Ils ont essayé de pénétrer en force et de procéder à des contrôles d’identité. Nous nous sommes opposés. Plus tard dans l’après-midi, quelqu’un est venu réparer notre porte d’entrée. La brigade anti-criminalité l’a embarqué en prétextant des dégradations. Cet homme a fait vingt heures de garde à vue gratuitement. Le cynisme est total » En attendant le démantèlement programmé du centre, Matouf adresse le message suivant à la préfecture. « Nous sommes prêts à discuter. S’ils ont vraiment un projet ici, nous voulons bien partir au commencement des travaux. Hélas, la réalité est que ce projet n’existe pas. Nous les gênons, point barre. »

Actuellement (08h19), une intervention policière pour vider les locaux du 70 allées des Demoiselles.

Christophe Guerra